samedi 22 décembre 2007

C'est mon anniversaire...

et pas celui de ta mère.

J'pars à Venise (le, LE cadeau de l'Amoureux).

J'vous embrasse.

lundi 17 décembre 2007

I'm Not There

Ses yeux brillent. Tu connais bien ça, toi, la douleur de l'autre, le cortège frissonnant des ombres, le regard perdu, la liasse de débris en éventail dans chaque main, à agiter, meurtrie, désespérée.
Peu de mise-en-scène, on se suffit à soi-même.
Ce que je sais et que tu ignores, ça n'est rien, sinon les étoiles, sinon la guerre, sinon la paix.
La lutte est toujours secrète, elle est toujours intérieure, elle se nourrit de nos ambivalences, nous sommes le grand monstre assoiffé de sang et de miel.
Qui peut laisser couler l'or sans y tremper un doigt pour en sentir la consistance, qui peut se désintéresser de lui-même au point qu'ensuite il ne porte pas ce même doigt à la bouche?
Alors, ça y est, les larmes coulent.
Elle est là, l'émotion, la tangente, le réveil brutal et incertain.
Mais cela fait partie d'un tout, et toi et moi, nous le savons, nous la connaissons, la longue mélopée déchirante, les accents toniques, les sanglots à contre-temps.
Permets-moi d'écourter un tant soit peu, il y a des refrains qui m'écœurent, qui pèsent sur ma poitrine, comme une masse visqueuse, un monolithe connu et reconnu (qui fait la sourde oreille).
Alors voilà que tu n'as rien à dire, que tu te tais, que tu te laisses ignorer, toi et ta prétention, toi et ton orgueil, ta solitude qui se voudrait plus ajustée, cousue-main, ciselée : une solitude infiniment baroque.
Et tu me regardes, voilà, regarde-moi, avec ces beaux yeux brillants que je t'envie, dans cette glace qui ne me réfléchit pas mais qui m'annule, qui ne m'engage plus à rien sinon à être toi.

Qu'est ce que ça vaut d'être fasciné par son propre reflet ?

L'assurance que je est un autre.

samedi 15 décembre 2007

Avec un peu de cynisme...

... On peut tout faire.

vendredi 14 décembre 2007

Subway

Pour reprendre Coelho, il y a quelque chose en moi qui conspire à la chute.

Dans 20 ans, je serai une femme aux cheveux blonds peroxydés, qui ignorant qu'elle n'a plus les seins de sa jeunesse, portera sans soutien-gorge des tops atrocement moulants, aux couleurs criardes, des jeans taille basse laissant déborder la graisse, comme une rivière de lave.

J'aurai tout essayé des anti-dépresseurs à la cocaïne. Je serai amère.

Je penserai à ce jour où lisant par dessus l'épaule d'un homme dans le métro, j'ai eu l'assurance de ce destin morbide.

Etalant plusieurs feuillets sur ses genoux, il s'attache à faire ses devoirs.

Marine a 12 ans, elle a des difficultés à l'école en mathématiques, mais est une élève sérieuse, elle aime s'habiller avec soin. Son père est docteur et sa mère est employée dans une agence de publicité. Elle aime monter à cheval.

Françoise a 54 ans, elle est professeur de technologie, elle vient d'avoir un rdv avec un cancérologue. Elle fait en sorte d'être toujours à la pointe de la mode. Son unique fille se marie dans trois jours... Mais son mari est malade.

Jean-Paul a 21 ans, il connaît la galère en étant guitariste dans un groupe de rock français. Il est au chômage. Il aime l'espagnol et la littérature.

Imaginez la personne qu'ils seront dans 20 ans. Je m'y essaie.

Marine a 22 ans, elle s'amuse à déchiffrer les méandres que produit la fumée de sa cigarette. La musique festive qui s'écoule de l'appartement d'à côté n'a qu'une incidence vague sur elle. Elle a froid surtout. Elle pleure surtout. La vie n'est pas aussi bien réglée qu'un corps. Elle veut enfouir sa tête dans l'oreiller et arrêter de respirer. S'endormant sans écraser sa cigarette, elle brûle vive avant que les pompiers soient arrivés.

Françoise a aujourd'hui 74 ans, elle a renvoyé son cancer d'où il venait, aux confins du hasard et des approximations génétiques. Sa fille a deux charmants enfants dont elle s'occupe beaucoup. Ils lui font vivre une deuxième jeunesse, surtout l'aînée qui a 15 ans, elle retrouve en elle ses émois d'antan, en illuminations chétives, et en remercie Dieu dans un soupir émerveillé.

Jean-Paul a 41 ans, il a pris autant de poids que d'années, de ce post-adolescent à l'allure grâcieuse, il ne reste rien. D'ailleurs, les personnes de son entourage ignorent qu'il y a quelques années en arrière, on le surnommait encore Rimbaud. Si on leur disait, elles exploseraient sûrement de rire. On voit en lui avant tout un homme fat, un homme qui a réussi. Vins capiteux et belles filles. Il siège à la Star Académie 274.

Il y a un autre exercice.

Aujourd'hui, je vis dans une grande ville, je travaille seulement 15h par semaine, quand je rentre chez moi, je mange des plats surgelés. Par ma fenêtre, je vois des tours. Mon appartement est moderne. Je ne mets pas le chauffage parce que je n'ai pas assez d'argent pour le payer. Alors j'ai froid.

Continuez la phrase selon vos envies, en employant cependant des verbes au futur simple.

Demain, je vivrai en Provence...

Je ne peux pas me défendre de l'idée qu'il n'y a rien de plus cynique de la part du quelconque organisme social qui est derrière tout cela que d'obliger ses brebis égarées à faire fonctionner la machine à fantasmes, de les obliger à rêver alors qu'il n'a rien à leur offrir si ce n'est la preuve de leur vide existentiel.

Et l'homme me faisant écho écrit :

Demain je vivrai en Provence, je serai riche, je n'aurai pas besoin de travailler, j'aurai une tour HLM pour moi tout seul, j'aurai chaud, je serai mort.

mardi 11 décembre 2007

..

Il faudrait décrire le ciel, la façon dont les nuages s'accumulent, laissant un trait bleu pâle d'une finesse angélique, de ces horizons éthérés, innocents.

Ce serait plus simple de prendre une photographie, n'est-ce pas?
Pourtant, elle ne croit pas que l'appareil puisse capter la beauté, ou peut-être que si, mais pour la figer, pour en immobiliser le mouvement, sans retranscrire ce que cet instant, ce paysage a à offrir.

Elle se dit qu'elle-même est un peu comme un cliché, glacée et brillante.

Il faut fermer les yeux, et imaginer le reflux de la mer quand on pense à elle, les marées, la lune, de ces choses viscérales, autant d'obsessions que de défiances.

C'est ainsi qu'on la connaîtrait vraiment...

Sur les négatifs des photographies que j'ai fini par prendre d'elle, entre deux soupirs, deux sourires, deux larmes, on voit apparaître la brûlure de son regard, et l'incandescence de son âme...

samedi 1 décembre 2007

Baby On The Plane

.

Lisa Germano - Baby On The Plane

Je gravissais péniblement le chemin de terre tandis que lui, plus haut déjà, cueillait ça et là les odeurs de bois mouillé, d'herbe fraîche, de champignons - toute la panoplie automnale de senteurs, qui m'était tristement interdite par l'étroitesse de mon souffle.

Ca sonnait comme une bonne idée, cette escapade champêtre. Je voyais à ses yeux, quand il se retournait quelques fois pour me sourire - et se moquer un peu de moi, qu'il allait indolemment puiser dans quelques souvenirs d'enfance rieurs et limpides.

La nostalgie est courte souvent, elle trouve vite son point d'ancrage, pour peu que l'on sache le deviner, et c'est là que l'on aperçoit ce nœud, le nœud d'émerveillement, et bien que l'on dise vouloir le délier pour comprendre, on le contemple comme un beau mystère, sans même oser tirer sur un de ses fils, de peur qu'il n'en reste rien.

Arrivés en haut de la côte, décelant que ma respiration se faisait plus régulière, il reprit la conversation restée en suspens quelques mètres plus bas.
- De toute façon, lui, il a toujours souffert d'un certain manque de sensibilité.
- C'est ironique ce que tu dis là.
- Quoi?
- Ben, le fait de se retrouver en proie à la douleur parce qu'on ne serait pas assez sensible, pas assez réceptif...
Il eut l'air de réfléchir quelques temps.
- Tu es très touchante, tu sais.
- Non, je suis différente, ça n'est pas exactement la même chose. Et tu verras, on s'en lasse vite.
- Franchement, qu'est ce que tu peux être prétentieuse des fois...
- Ah, tu vois?

Il prit ma main et en grandes enjambées quitta le chemin pour s'enfoncer dans les bois. Avec infiniment de douceur, il m'allongea sur un lit de feuilles mortes et m'administra quelques baisers enflammés, pour entrer ensuite en moi en un bref et vif mouvement. Je le laissais faire pendant quelques temps, puis l'obligeais à se retourner, grimpant sur lui, non pas pour, comme on peut lire ça et là maintenant grâce à la libération sexuelle des femmes, me procurer un orgasme, mais parce que je commençais à avoir sérieusement froid aux fesses. Cela parut lui plaire et l'affaire fut, dès lors, rondement menée.

Nous nous relevâmes sans grandes pompes, sur son visage flottait cet air léger, émoussé, que j'adore et qu'il a toujours après que nous ayons fait l'amour.

Nous rentrâmes ensuite, un peu silencieux, riant de temps à autres des tâches de lumière qui apparaissaient sur le sol, du chant des oiseaux.
La nuit tombait doucement.

Quelques amis étaient venus nous rejoindre dans cette maison que me prêtait mon père quand il n'était pas là.
Jouant des coûteaux et des fourchettes autour de cette raclette gargantuesque, le vin rouge progressait lentement sur les visages, animant nos joues d'un rose éclatant et nos bouches de paroles légères, parfois sarcastiques, de fous rires et autres gourmandises de nos belles amitiés.

Je restais un moment devant la cheminée où brûlait tranquillement un feu de bois tandis que tout le monde était allé se coucher.

J'allais plus tard m'étendre à ses côtés, il se retourna en grognant un peu et passa son bras autour de moi.

Je soupirai, les larmes aux yeux, il ne se passerait donc jamais rien?

Cette nuit-là, je fis un rêve étrange. Je me retrouvais à bord d'une espèce de vaisseau spatial. Je me voyais moi, face à la baie vitrée, regarder l'immensité de l'univers, et ensuite, réintégrais mon corps pour admirer le vide où s'étalait, immense, une forme scintillante, incroyablement belle, à la fois immatérielle et compacte, qui s'étirait pourtant d'un jaune dorée, puis brun, jusqu'à se perdre dans un bleu veloûté tirant sur le violet.
Et c'est ainsi que l'évidence m'empoignait. Voilà tout ce qu'il restait du monde, de la Terre : une ecchymose fânée.

Etait-il de bon goût de se demander contre qui le coup avait-il été porté?

vendredi 23 novembre 2007

Dé-boire

J'imaginerai bien une fille aux traits énergiques (quoique ça puisse bien vouloir dire).
J'illuminerai son désir en frasques idiotes, aux illuminations subtiles.

Elle pourrait dire à ses amants : " Le désir, c'est la sensation imparfaite de l'autre, et une sensualité, même maladroite, en est parfois une de ses plus belles expressions."

Elle fendrait l'air de ses bras, aveugle : Elle aurait émietté la lucidité, couchant sa colère sur un lit de neige et de gaze.

Et comme on fait son lit, on se couche, elle aurait chevauché en sueur bien des rages, impérieuse et désespérée.

Elle redouterait par dessus tout la trahison, l'ineffable, celle du réel.

D'appréhensions naïves en abandons débonnaires, elle aurait craché sur tous ceux qui l'auraient approchée.

Comme arme, elle n'aurait après tout qu'un désert, construit pièce après pièce, à traverser seule.

Une maison vide, dont l'orage aurait été éventé.

Dans l'espace de ses bras, elle en aurait accueilli l'effondrement final, pour mieux s'y faire.

Et dans une ombre rescapée, bienveillante, elle aurait alors noyé son désir d'enfant, son enfant.

Sa soif.

vendredi 16 novembre 2007

Publicité (pas mensongère)

Hier, nous avons tenu un atelier de création collective avec mon association. Je vous conseille vivement d' aller en apprécier les effets.... Ca se passe .

Un petit teasing, tout de même, avec un des textes de mon cru :

(Le principe est simple - et issu des règles de l'OuLiPo, quelqu'un choisit un certain nombre de mots que l'on doit utiliser)

plaine/vague/non-lieu/parenthèses/engeance/terrain/errer
courir/rester

Un vague non-lieu,
parce qu'à vrai dire, c'est entre tes parenthèses que je t'apprécie le plus :
Un peu flou, un peu usé, sans réduire les marges, sans même y penser.
Echouer ou réussir, entre courage et lâcheté, c'est le même terrain pour une même engeance : les montagnes russes du déplaisir puis la plaine du désarroi, le cheminement abstrait des élites du désespoir.
Cette errance-là, elle ne te ressemble pas.
Entre rester et courir, il y a entre. C'est là que je me déshabille.

à S.


mercredi 14 novembre 2007

Senses & Sensitivity

Je ne me suis pas réveillée ce matin.
Hier, j'étais bien trop occupée à épier les mots.
J'ai regardé à mon poignet ma montre, mais il n'y en avait pas.
J'oublie même parfois que nous n'avons jamais eu le temps (de rien).
J'oublie tes yeux qui divergeaient mon âme.
Tes regrets n'ont presque plus de sens.

Je ne me suis pas réveillée ce matin, et mon corps colle encore aux draps, au lit qui lie mes courbes et mes creux.
Hier, je regardais le vide que tu y as laissé. Je me suis dit qu'il était déjà là, bien avant toi.
J'oublie encore souvent que nous n'avions nulle part où aller puisque nous avons toujours été séparés.

Quand je contemplais l'azur de tes yeux, et celui de ma peur, c'était le même refrain, la même harmonie un peu triste, un peu outrée.

Ce matin, je ne me suis pas réveillée.
Hier, je réalisais ton absence en moi.
J'oublie maintenant de t'oublier.

Ce matin, je suis morte dans ton sommeil.
C'est l'avenir qui m'a réveillée.
Mon corps flottant prend de bonnes habitudes.
A peine debout, et il fait danser le café, il frotte mes pieds l'un contre l'autre, il beurre la musique, tartine la douche.

Mes yeux voient flou. Mais ma bouche dit "Au diable, la mise au point!"

J'ai dit que j'avais froid et ce n'était pas vrai. C'était juste pour qu'il me serre contre lui.
Je n'ai pas besoin de me souvenir de lui, puisqu'il est là, à portée de mains, de yeux, de bras, de voix,... d'amour.

La vie est aussi sensible que je le suis.

samedi 10 novembre 2007

.

Avant, je croyais que deux amants étaient forcément bavards. Je ne savais pas combien l'on pouvait être abrutis de désir. Ecrasés d'un défi lancé aux étoiles.

Nous avions pris le train, pour nous mettre à l'épreuve, du temps.
Du paysage qui défile.

Nous avons bu. L'ivresse est venue avant.

L' imminence. Ce danger latent, qui met en scène les fragrances du désir et l'odeur de la peur.

Chacune de ses résolutions...

Cet air connu que l'on s'amuse à déchiffrer, pour le plaisir...

J'ai pris ta place quand tu es parti. Au creux de ton lit, j'ai un peu baillé, je me suis étirée. Je voulais sentir mes articulations craquer dans ton corps, je voulais éprouver ta fatigue, la savoir me distendre.

lundi 5 novembre 2007

One More Cup Of Coffee

Pauvre satyre, il te faudra abandonner ta surdité pour un temps plus clément,
pour une mémoire plus vive.
Bon gré, malgré.
A n'en pas douter, c'est la souffrance d'être venu au monde qui force le barrage de tes doigts, la corde invisible à tisser en deçà du souvenir qui s'ignore.
A n'en pas douter, l'abstinence a la peau sur les os.
( a TA peau sur les os)
Dérobée aux regards, dans une lumière plus pure qu'un retour aux origines, ta peur se démembre.
Sa demeure se perd au sein de chaque ventre.
Là où tu as torturé ma foi, je t'ai laissé planter une graîne, les mots poussent, moisis, les actes, eux, ont la vérité d'un cadavre que l'on enchaîne à la terre.
Il pourrait en faire de la liqueur, mon père absent, mais sa soif a été étanchée avant même d'avoir pris forme.
Rien n'a plus d'incidence (,) quand on y pense.
Qu'est ce que tu fais en ce moment?
Je me désengorge, c'est tout.
Pourquoi?
Parce que je veux résolument te nier.

1+1 = 0

D'accord, tu peux me cracher au visage mais seulement si tu le fais avec application.




(Monte le son)




(j'ai assez parlé d'amour, là?)





vendredi 2 novembre 2007

Abonnée absente

(petit mot trouvé dans ma boîte aux lettres, aujourd'hui)

"bonjour excusé moi pour le dérangement je veux vous dire que tu me plait becaup ça fait longtemps que jenvie de vous le dire mais je suis un peut timide j'ai des sentiment envers toi. si y a moyen et si t'es libre j'aimeie bien de faire des connaissance avec toi, voila quoi? je suis le mecano et tu me connais bien. si vous ete interessé voici mon numero 06 ** ** ** **"

(petit panel de textos/mails de la même personne qui s'échelonnent sur environ un mois et demi, et n'ont jamais obtenu de réponse)

"tu crois qu'on peut vivre asocialement? - tu penses que c'est possible de vivre sans laisser de traces? - tu as encore foi en l'homme toi aujourd'hui? - il faut qu'on parle, vraiment - j'ai vraiment besoin de te parler - toujours pas décidée à répondre? - tu ne réponds pas, dommage - toujours pas décidée à répondre - tu as déjà mangé indien?- ne fais pas ta mauvaise tête"

Bizarrement, je me demande pourquoi je préfère celui qui ne m'écrit pas.


Muhuhu

mercredi 31 octobre 2007

Anyway

J'peux rien dire. Voilà.

A part que j'suis bien d'accord avec ce que dit Monsieur Fishturn. Que je salue de fait.



samedi 27 octobre 2007

S'oublier

On n'espère pas s'inscrire dans le temps, on s'y inscrit, voilà tout.

Tu m'as dit : le mot avant la pensée.

Je pourrais te répondre la sensation avant toute autre chose.

Cruelle et fulgurante, une histoire sans nom.

Ta lettre accolée à la mienne, non.
Je n'ai rien à graver.
Si ce n'est dans le vent.

Le récit du non-souffle chez moi, c'est aussi évident que celui de l'asthmatique qui n'a pas sa ventoline : Une vraie histoire d'amour.

Je t'ai dit : le désert.

Tu m'as répondue d'un regard.

Cette boîte noire de ton envie de vivre, je m'y coulerai bien tout entière, au fond d'un océan de sable.



mardi 23 octobre 2007

Il fait beau, lalala

.

Un point lumineux.

Il fait face aux nébuleuses qui constituent l'essentiel de mon être.
J'ai ajourné le sentiment de plénitude.
Regarde comment je fais : je prends du papier, je plie, je dessine et je coupe dedans.
Ca fait des bonshommes qui se tiennent par la main.
Et après, je coupe encore un par un.
Jusqu'à ce que je n'ai plus que des miettes de papier disséminés en petits tas inutiles.
C'est pas bien pour les arbres, ma maman a dit.
Ce que je fais pour rendre à la nature, ce qui revient à la nature, c'est que je regarde les couleurs mordorées et chatoyantes de l'automne m'iriser la pupille.
Enfin, je peux pas le voir ça, mais c'est l'impression que ça me fait.
J'arrive même à le faire sans reprendre mon souffle.
A la fin, je deviens bleue.
Assez pour penser que marcher sur l'eau est possible.
A la place de traverser des ponts.
Parce que tu vois, c'est ce dont ma vie est faite : traverser des ponts.
Alors que franchement, je préfèrerais marcher sur l'eau.
Ce vieux fantasme, immense d'onirisme, épouvanté de chaos ambiant.
Je préfère ça à voler, je te le dis tout de go.

Densité et inconséquence, réunies, unifiées, fondues l'une dans l'autre.

Le mystère du résolu, c'est un mystère de résolu.

Là, ça sent la volute du café dans l'air et puis celle de la cigarette aussi.
J't'dis pas l'inanité du truc.

.

lundi 22 octobre 2007

The Story Of My Life (4)


18.11.2006



Je me balançais sur ma chaise. Mais la chaise ne suivait pas. Je me suis donnée l'impression d'être une adolescente américaine en proie à une crise de nerfs, si j'avais eu les cheveux longs, je me les serais peut-être arrachés. Histoire de rajouter du piment à la chose. J'étais enfermée là, depuis combien de temps finalement? Quelques minutes tout au plus? Je me sentais déjà oppressée. Une salle d'attente froide comme il se doit. Avec des affiches publicitaires géantes au mur. "Violences Conjugales, appelez, c'est un numéro vert". Ma mère regardait de côté, les yeux rivés sur un point fixe. Il y avait quelque chose d'insondable dans sa façon de se tenir. Un vide arrachée à la peine, je pense. Quelques minutes auparavant, elle m'avait intimée de me la fermer. Je babillais de tout et de rien, riais un peu trop fort, j'imagine. Ce n'était pas vraiment décent, même pour moi-même.


-Mlle...hum... Soliquet Maëva, pourriez vous venir, s'il vous plaît?


L'infirmière sur le pas de la porte venait de trouer le fil de mes pensées. Démunie, je me levais. J'intimais à ma mère de ne pas bouger d'un simple geste. Là où j'allais, je serai seule, et je ne voulais pas que cette sensation soit exacerbée par sa présence. Elle a délibéremment ignoré ma volonté muette et s'est levée à ma suite. L'infirmière a déballé son lot de questions, beaucoup plus précises que celles du policier qui m'avait reçue la veille. Elle semblait faire preuve d'une véritable compassion à mon égard. Pourtant, il y avait quelque chose en moi qui me disait que c'était impossible. Elle devait pouvoir sentir les aspérités de la souffrance, pouvoir contourner certaines choses, elle avait dû apprendre à épouser les corps tuméfiés, brisés de ceux et celles à qui elle avait affaire... Elle devait pouvoir distinguer l'horreur du viol, comme un soleil derrière de multiples nuages, qui aurait affranchi l'un de ses rayons par moments... J'ai répondu machinalement à toutes ses questions, parfois je butais un peu, quand je n'arrivais pas vraiment à comprendre ce qu'elle attendait de moi. J'étais une immense interrogation. Je voulais savoir qui j'étais, qui j'étais maintenant, pour être assise dans ce bureau, pour raconter cette histoire, qui semblait appartenir à une autre. Elle m'a dit que le docteur allait me recevoir, et je me suis retrouvée sur la même chaise, immobile cette fois-ci. Le regard mouvant. Il y avait un homme dont le visage était ravagé, marqué de plusieurs coups, des bleus, des plaies, le visage rouge d'avoir trop pleuré. Nos yeux se sont rencontrés. Et les siens semblaient me demander si nous faisions partie du même monde maintenant, de ce même endroit où la violence était la seule et unique résonnance, l'ultime écho de notre innocence pulvérisée. J'ai détourné la tête, j'avais envie de dire non, parce que je ne pouvais pas non plus dire oui.


Le docteur a prononcé mon nom, je l'ai suivi dans un long couloir. Il y avait une interne avec lui. Je me suis un peu déshabillée. Il faisait froid, horriblement froid. Tout mon corps a frisonné et je me suis sentie vaciller intérieurement. "C'est douloureux, ici? Et, ici?"


J'ai répété encore.


En regardant par terre.


Moins d'empathie, le regard technique, scientifique, objectif. Froid, professionnel. Ca m'a fait du bien, peut-être parce que ça rendait les choses plus réelles ou plus irréelles, je ne sais pas.


Nous avons marché le long du couloir, les murs en béton nus me glaçaient le sang, comme si j'avais pénétré dans un endroit interdit, où il se serait déroulé des recherches scientifiques étranges et éthiquement condamnables.


Ca devait être ça, oui, je devais être en pleine science-fiction.




samedi 20 octobre 2007

The Story Of My Life (3)


11.05.2007


Je ne pourrai jamais oublier la fulgurance avec laquelle je l'ai aimé. La brutalité de ce sentiment. La faille qu'il a toujours su occuper. Pour me faire du mal.


Comme démembrée, un pantin désarticulé.


Je l'ai quitté. Je ne pouvais plus supporter ses mains. C'était une des premières choses qui avait attiré mon regard sur lui, ses mains, longues, fines, délicates. Je les avais très vite imaginées se poser sur ma nuque, étreindre mon visage. Maintenant, j'ai peur qu'elles ne m'étouffent, ne m'enserrent, ne me laissent des traces indélébiles sur la peau.


Je vois la caresse se transformer en un acte de cruauté, je sens ma propre résignation.


C'est ce qui est le plus effrayant, cette passivité. Cet espoir mêlé de désespoir, alors tu m'aimes puisque tu me hais. Alors tu m'aimes puisque tu me tues.


Ton pouce se pose sur mes lèvres.


Et oui, je me suis tue.









vendredi 19 octobre 2007

The Story Of My Life (2)

12.04.2007


Hier, j'ai rejoint Amandine chez elle. Une pulsion, l'envie de sortir, de ne plus tourner en rond comme une lionne en cage, envie de humer l'air, de dompter la nuit.


J'ai fourré une bouteille de rhum et du jus d'orange dans un sac plastique et je suis sortie. L'air était doux, il avait plu et l'asphalte brillait. Je me suis engouffrée dans le métro, j'ai attendu la rame en me dandinant sur la musique que j'étais la seule à pouvoir entendre, qui s'échappait de mes écouteurs et irriguait tout mon être d'une émotion bien pratique, préfabriquée. Mon corps et mon esprit ne faisait que répondre à son écho, je n'avais plus à décider.


C'est ce que j'ai recherché encore, une fois arrivée chez elle, en lui donnant l'occasion de me parler, je voulais me remplir d'elle, me remplir de sa vie à elle, et m'oublier un peu. On s'est servi quelques verres et aucun n'est vraiment passé, j'étais obligée de faire un effort surhumain pour ne pas grimacer à chaque fois que j'en prenais une gorgée. Vers minuit et demi, je suis partie. Essouflée dès les premiers pas, la fraîcheur de la nuit, son odeur particulière, les lumières jaunes des réverbères ont immédiatement habité mon esprit. Abandonnée à cette ambiance si particulière, je me suis plusieurs fois arrêtée sur le Pont St Pierre pour scruter la Garonne et emprisonner ses remous dans ma tête. Ma traversée arrivant à terme, le décor autour de moi s'est peu à peu illuminé, Bjork hurlait dans mes oreilles if travel is searching and home has been found I'm not stopping, je me rapprochais de mon but et les battements de mon coeur revenaient doucement à la normale I'm going hunting I'm the hunter, une fraction de seconde, le monde m'appartenait et j'étais là pour le conquérir. J'ai souri à cette pensée fugitive, rangé mon lecteur et poussé la porte du bar.


J'ai frayé mon chemin parmi toutes ces personnes déjà passablement ivres. Comme toujours, dans ce genre de rassemblements, je décelais une connivence secrète, une complicité entre tous que j'étais peut-être ou peut-être pas la seule à voir. Je me suis approchée de lui, il portait sa casquette, ses yeux brillaient, il a dû se plier en deux pour m'embrasser, il m'a sourie et à l'expression de son visage, j'ai tout de suite senti qu'il était attaqué lui aussi. Je lui ai souri et j'ai dit : j'ai soif. Il m'a tendue sa bière. Le spectacle pouvait continuer. Je ne retiendrai pas grand chose de cette soirée : la fille au dos nu, son regard avide récusé par l'ingénuité de ses traits ; les yeux en amande, leurs cils incroyablement longs d'un garçon timide ; l'enthousiasme de celui qui est venu me demander mon prénom c'est bon on sait qui est "tout le monde" ce soir, ici, maintenant avec la joie de l'enfant qui a accompli une mission sacrée. C'était peut-être tout simplement ça, tout ce que l'on espèrait, la négation de l'avenir, la perpétuation des débuts, rester au seuil, ne pas franchir l'infime barrière vers l'âge adulte. Ca aurait été facile d'y voir quelque chose de pathétique, de futile, dans cette profusion vaine d'alcool pour oublier les lendemains morts, les vies tracées, les rêves étouffés, ça aurait été justifié d'être cynique et de cracher sur le peu d'illusions qu'il nous restait... De façon assez inattendue, je m'y suis refusée. J'avais envie de me fondre encore une fois j'imagine, être la corde sensible de cette détresse riante.


On a marché ensuite pendant bien une demi heure, discuté.

- Mais, regarde-moi ça comment c'est ignoble.

- Ce n'est pas ignoble, c'est juste absurde.

- Eh bien, justement, tout ce qui est absurde est par définition ignoble.

-...

- Mais regarde comme c'est moche, l'architecture moderne, et les gens, ils disent "ah oui, c'est beau, oh là là"

-Tu crois vraiment que les gens, ils prennent le temps de se demander si c'est beau?

- Non, non... Ils s'en foutent. .

-...

- Je sais que tu dois mettre mon comportement sur le compte de l'ivresse et me trouver déplorable...

- Non, ce n'est pas ce que je fais. Je comprends.

- ...

- Quand tu te réveilles des fois le matin et que tu te demandes soudainement pourquoi les parkings existent, je crois que t'es déjà mal barré...


J'ai ouvert les yeux vers 10 heures, il prenait toute la place. Il s'était endormi dix minutes après s'être allongé. Il m'avait demandée de lui donner la main. Je savais qu'au bout d'un moment, fatalement, je lui reprendrai et me retournerai. J'avais du mal à rester collé quand je dormais. Je fuyais toujours, pour me retrouver seule et pouvoir m'abandonner... Sinon, je restais dans la retenue, je ne me laissais pas aller au sommeil.

J'ai bougé et il a ouvert les yeux. Je prends toute la place? Il faut pas hésiter à me le dire... Mais son visage était tellement détendu quand il dormait... C'était même presque effrayant de voir ces traits autant changer. Je me suis assise au bord du lit et j'ai tendu la main pour récupérer mes affaires, j'ai commencé à m'habiller. Il fallait que je sorte de chez lui, que je me retrouve seule, que j'erre dans les rues à nouveau. Être une partie du monde, un fragile et infime maillon de la chaîne, faire partie de cette constellation, m'abimer. Il m'a regardée faire sans vraiment comprendre l'urgence qui m'animait. Pas de café? Non, pas de café, juste le ciel au dessus de ma tête, le ronronnement des voitures, la lumière trop crue.


Observer les gens dans cette ronde interminable, ils passeront finalement comme des ombres, au seuil de mon monde.


J'aurais aimé que nous ayons cette liberté-là, la liberté de danser, extraits de nos vies, cette légèreté indicible, comme une chose qui serait restée en surface, tout en prenant ces racines très profondément.


mardi 16 octobre 2007

Le début de la célébrité

J'ai été chroniquée par le grand MRY dans sa rubrique-fleuve "Le Blog des Filles"...

"avec délicatesse, justesse, romantisme et parfois furie"

.... P'tain, ça me donne envie de me poser en rockstar de la blogosphère.

A quand les chambres d'hôtel dévastées?



(j'essaierai de pas flanquer mon PC par terre pour le coup quand même, y'aurait personne pour trouver ça révolutionnaire)

(Merci sinon, hein)

dimanche 14 octobre 2007

The Story Of My Life

24.04.2007


Je me frotte les yeux, réveil difficile. Comme coincée entre deux mondes, ma tête parle trop fort et tout ce qu'il y a autour de moi glisse sans trouver le moindre point d'ancrage. Je voudrais faire le portrait des gens qui sont là, présents en même temps que moi, mais je ne sais pas dessiner. Alors je baisse les yeux et tourne la cuillère dans mon café, je m'oublie dans son odeur, je me focalise sur le bruit que fait la cuillère au fond de la tasse. Je relève les yeux, et incidemment rencontre le regard d'un homme. La trentaine passée, cheveux mi-longs, quelque chose de sauvage dans le visage, un air résolu à arracher n'importe quel plaisir à la vie, un air qui dit "si je te veux, je t'aurais". Je détourne la tête, ce n'est pas moi qu'il cherche, je me suis sûrement trompée. Je joue à chat perché, tendue vers un seul but, j'attends patiemment que le breuvage amer soit moins chaud pour le boire, je suis au-dessus de cet expresso et j'attends, penchée, clouée, suspendue. Je reste floue, entre deux eaux, j'existe à peine, personne ne doit pouvoir me voir. Je me risque cependant plusieurs fois à lever la tête, et à chaque fois, un terrible constat s'opère, c'est bien moi qu'il regarde, moi qu'il défie silencieusement. Plus je fuis, et plus j'ai l'impression qu'il fait quand même une erreur, il s'est trompé de protagoniste pour ce jeu de chassés-croisés. Je ne suis pas celle qu'il croit trouver, je ne sais pas faire ça, je ne veux plus faire ça, faire semblant de pouvoir me donner à un inconnu, la simple idée qu'il s'imagine que cela soit possible me fait horreur. Je suis prise au piège dans son désir. Quand remonte cette bulle qui éclate à la lisière de ma conscience, je prends une grande inspiration, et avale ma première gorgée de café... Il veut savoir s'il plaît encore, s'il plaît toujours. Ca n'a rien à voir avec moi, ça n'a d'ailleurs jamais rien à voir avec moi, je ne suis qu'un prétexte vague, une excuse. Il m'a sourie quand je suis passée devant lui pour aller aux toilettes, j'ai entendu le son de sa voix, je n'ai pas répondu. Quand je suis revenue, il a attrapé mon bras, m'a fait asseoir en face de lui, je n'avais plus le contrôle de mes jambes, son audace me terrorisait.


-Vous voulez boire autre chose? Un autre café?


J'ai dit que ce n'était pas une mauvaise idée, dans ma tête, le rythme irrégulier de mon coeur battait ma peur, et tout le monde pouvait l'entendre, j'en étais sûre.


De plus près, son visage a quelque chose d'indéfinissablement taciturne. Les cernes sous ses yeux creusent ses nuits blanches, ses nuits d'insomnie.


-Vous savez que vous avez des yeux incroyables?


J'ai cru qu'il détenait un secret, quelque chose que je ne connaissais pas. Les yeux de braise, sa façon de se tenir, ça avait des allures anarchiques, il respirait la nonchalance, l'indifférence aux règles. C'était ça ma peur, lui était naturel, moi, en me donnant, je bravais un interdit, j'étais transfuge avec ma propre personne.


Force était de constater qu'il ne vivait pas en autarcie, qu'il suivait toujours les lois que tous les gens suivent, de ces rapports de séduction si peu honnêtes, il s'en était peut-être juste un peu mieux accomodé qu'un autre...


Mon appréhension s'est dégonflée comme un ballon de baudruche qu'on aurait piqué prestement, elle a éclaté dans mon esprit pour ne laisser qu'un nouveau sentiment, assez désagréable, mais bien moins déstabilisant. Le mépris. Ainsi, je reprenais les rènes, je maîtrisais à nouveau.


-Ah oui, et même que ce sont des vrais.


J'ai repensé à lui, à la façon dont on s'était rencontré. Déjà, oui, déjà, tout était là. La possibilité de le haïr, comme de l'aimer. Après, quoi? On ne fait que rejouer les mêmes souffrances et les mêmes joies constamment, outrepassant ce que l'on sait déjà.


Quand on aime sans retour, on ne compte pas, on décompte. Décompte jusqu'à la délivrance. Quelle qu'elle soit.


Je regardais l'homme qui m'offrait ce deuxième café. Si je m'intéressais à lui, je découvrirais sûrement qu'il n'était pas cette surface à laquelle je me plaisais de m'arrêter. J'apercevrais sûrement un monde de pudeur et de retenue, des blessures encore vives, des bonheurs inachevés sur fond de plaisirs assouvis.


Il n'était pas celui que j'aimais, il n'avait pas cette fureur si tangible, cette colère que je ne m'autorisais pas. Ou peut-être que si, mais je n'avais plus envie de le savoir. A quoi cela servirait-il de maintenir les apparences?


-Vous voyez, je ne sais pas ce que je fais ici. Je crois que c'est une erreur. Je vais payer ce deuxième café... Voilà, il faut que je m'en aille.


Je me suis levée, j'ai pris mon manteau, il avait l'air plus surpris que déçu, comme un enfant à qui on aurait subitement retiré un jouet de façon totalement arbitraire. Il n'y aurait pas de grosse crise de larmes ensuite, il oublierait rapidement, après avoir raconté cette anecdote une fois ou deux, ou il la tairait de peur de passer pour un incompétent. Finalement, ce qui compte, quand on devient vieux, c'est le sens de la dérision dont on peut faire preuve.


Peut-être, en fait, serait-il fasciné par ma liberté, cette main offerte au baiser, que l'on retire brutalement, parce qu'on se demande comment on a bien pu en arriver là, avoir le culot de le faire, stopper le mouvement, oser se reprendre, retirer ses billes.



J'ai franchi la porte sans un dernier regard, le sien me brûlait le dos.



Et je n'avais nulle part où aller.




vendredi 12 octobre 2007

Innocente, la fille, on a dit.

.

A l'école, en CE1, nous partagions la classe avec les CE2.
Pendant l'année, pour les CE2, il y avait une visite médicale obligatoire.
Peut-être étais-je encore perdue dans mes rêvasseries (je m'ennuyais) mais l'institutrice m'a demandée d'aller subir un examen de l'ouïe. J'ai dû lui demander au moins trois fois si c'était à moi qu'elle s'adressait. Je suis même revenue plusieurs fois de la cour pour lui redemander tellement je trouvais ça déplacé.
Peut-être était-ce mon imagination mais j'ai pensé qu'elle avait fait ça pour m'humilier.
Je savais que je n'avais aucun problème d'audition, j'étais ailleurs, voilà tout.
Je suis allée passer le test, qui n'a révélé aucun problème.
J'aurai préféré en avoir un, bien sûr.
Quelque chose de palpable, qui explique, qui rassure.

Encore aujourd'hui, quand je n'entends pas, j'en suis mortifiée.
Comme si je faisais exprès.

***

Plus jeune, quand l'on s'adressait à moi, je n'y croyais jamais.
Moi?
Geste interrogateur, mince balancement de ma main, de toi à moi.
Mon regard balaye les alentours...
Moi, vraiment?
Il faudrait qu'un jour, quelqu'un me reconnaisse à ma place...

***

Un de mes fantasmes, ce serait de défroquer un prêtre. Que l'on me préfère à Dieu, ça, ce serait la vraie classe.

***

Aujourd'hui, je portais pas de casquette mais je ressemblais à Paul McCartney.




jeudi 11 octobre 2007

From Toulouse To Paris

Tandis que j'attendais une amie dans un bar, c'est toi que j'ai vue arriver.
Alors,
j'ai bu
à ta santé, à ton rire, à nos coups de téléphone ratés, à notre envie de vivre (féroce), aux hormones qu'on se coltine en pagaille,
à tous les instants que nous avons passés ensemble, à ceux qui nous attendent.

J'ai trinqué à tous les voyages que nous avons faits, et à ceux que nous ferons demain et même à ceux qu'on fera jamais.

(A la fin, j'étais cuite. Mais c'était pour la bonne cause)





(Faut pleurer maintenant)

(Tellement tu me manques)

mercredi 10 octobre 2007

Autumn Leaves

.




Un café.
Juste ce qu'il faut de noir.
La lumière tamisée.
Levés aux aurores.
Le café reflète le noir de dehors.
Ou l'inverse.
Le noir qui entre en flots entiers par la baie vitrée.
La lumière tamisée.
Tu me racontes.
Racontes que cette nuit, tu es venu.
M'embrasser chastement.
Plusieurs fois.
Dans un mouvement irrépressible.
Je ne me suis jamais réveillée.
De le savoir, quelque chose s'ouvre en moi.
A l'image de ce matin.
Des mots que nous échangeons.
Presque inaudibles.
Je t'aime tellement,
que des fois,
j'en ai presque mal.

.

dimanche 7 octobre 2007

Lost Highway

.

This Mortal Coil - Song To The Siren

L'un e(s)t l'autre
comme les deux faces
d'une même pièce
qui porteraient le
même nom

l'un bruisse de
mille sons -- interdits
l'autre danse
en images -- opaques

amoureux d'une
nudité aphone,
d'une nudité
obscure

comme une pulsion
électrique
A l'envers
Et
advienne que pourra

pour la caresse d'un corps inconnu

pliés
estropiés

Dire NON
Penser OUI

perdre
et perdre encore
jusqu'à ce que
perdre
ne signifie plus rien

c'est ici
et maintenant

.

à B. & I.


jeudi 4 octobre 2007

The Chronicles of Nothing

- Tu te rappelles de ces journées blanches?
- Moi? Très bien.
- Tu as souvent mal à la tête, ces jours-là.
- Oui, c'est la lumière, mes yeux, tu sais.
- Tu pleures?
- Oui, j'ai mal.
- Mais... Il fait nuit.
- Je sais...

***

J'ai commencé à faire rouler ce caillou. D'un coup rapide et efficace du pied, je l'ai envoyé à quelques mètres de moi.
En définissant une trajectoire précise de façon à ne pas avoir l'air d'un idiot.
J'ai commencé à faire rouler ce caillou mais je ne sais pas très bien pourquoi.
Je suis sorti du collège et il était juste là, il traînait négligemment, il ne me demandait rien et moi non plus.
Je ne crois pas que notre attitude ait maintenant changé que cela soit la mienne ou la sienne envers l'un ou l'autre, on fait simplement un bout de chemin ensemble. Ca n'a aucun sens, c'est comme ça.
Pourtant en le faisant cheminer avec moi, ce caillou... Je ne peux pas m'empêcher de me poser des questions stupides du genre "mais d'où il vient ce foutu machin", je me dis que les cailloux, c'est de la pierre, alors qu'il vient sûrement de la montagne, mais je peux aussi me demander depuis combien de temps, il erre seul et petit sans la masse informe et compacte de sa terre d'origine si je puis oser dire.
En même temps, de la roche y'en a aussi de la souterraine, et si on en croit la tectonique des plaques, tout a commencé par là d'ailleurs.
Mon caillou, il vient forcément d'en dessous.
Mais d'en dessous d'où?
Les Pyrénées, les Alpes?
Pourquoi pas même les Rocheuses?
Et puis je me dis que je lui veux quand même une origine prestigieuse à ce caillou, alors que peut-être, il vient d'une colline de nulle part, d'une colline qui a même pas de nom, où seuls les habitants du coin l'appellent la colline du Canard, parce qu'elle a vaguement la forme d'un bec.
D'un certain point de vue.

***

Tout à l'heure, je travaillais. Je distribuais un journal gratuit à la sortie du métro. Pour cela, je suis obligée de portée une casquette.
J'ai vu mon reflet par secousses dans les vitres d'une voiture qui passait.
J'y ai vu une nette ressemblance entre moi et le Big Lebowsky.
Allez savoir pourquoi... N'empêche, je me suis bien marrée toute seule.

***




mercredi 3 octobre 2007

M.D.

Ce type-là quand je le vois, ça me fait des fourmis dans le bas-ventre, je te raconte même pas. Il a des yeux, d'abord d'un bleu glacial, avec de temps à autre, un sourire narquois qui perce, ça m'électrise direct de bout en bout.

Y'a peu de mecs comme ça avec qui on se dit qu'on pourrait/devrait être une garce, laisser parler le sarcasme, l'ironie froide pour un résultat bien plus sensuel qu'il n'y paraît.

Il s'agit d'une joute, que je suis au mot à mot, en espérant pouvoir la vivre au corps à corps.

La lucidité, l'honnêteté crue, ce sadisme ambigü, ça me fait exploser les hormones, mais alors laisse tomber...

Mes jambes tremblent dès que je l'aperçois, mais même pas il me capte le mec.

D'ailleurs, j'essaie même pas de lui parler, j'ai trop l'impression d'être transparente.

Mon désir est comme drapeau fièrement dressé qui rêverait d'être en berne.

Je ne veux être qu'envahie, conquise, connaître cette magistrale défaite...

Repue de cynisme et de sexe comme un vieux gros chat se repaît d'avoir vécu, devant un joyeux feu de bois.

Oui, oui, j'avoue.

Je veux coucher avec le Docteur House.

Mais, à mon avis, en vrai, le secret, c'est sa canne.

mardi 2 octobre 2007

ch-ch-Changes



Je veux pas que vous me quittiez, j'ai dit, en sanglotant.
J'en ai repoussé un qui s'imaginait m'apaiser avec un geste tendre.
L'autre se tenait à distance respectable, je devais avoir une tronche de bête traquée, elle devait se méfier.

Je suis sortie dans le jardin en contre-bas, l'herbe était humide. Il venait de pleuvoir, et l'air stagnait comme un soulèvement au coeur. Une nausée qui s'étire, s'étire...
Le genre de journée où tu te dis que tu ferais mieux de rester chez toi et quitte à y être, que ce soit tranquille.
Les effusions, ça me gonfle.
Elles apportent une densité à une journée que je rêvais plate, insignifiante, vierge, un coup pour rien : quelques heures tirées à blanc.
Comme si ça suffisait pas que ça m'arrache les tripes qu'ils s'en aillent... Faudrait aussi que je l'exprime!

Voilà.

Me traîner jusqu'au grand marronnier qui trône au milieu du terrain, essayer d'enlever un bout de l'écorce, et ne réussir qu'à m'abîmer un ou deux doigts.

Je me colle à l'arbre de tout mon long, je voudrais sentir le sang battre, le coeur en sourdine.

Tout ce que j'obtiens, c'est un long frisson qui me remonte des reins jusque dans le sommet du crâne.


***

Les maisons sont toujours les mêmes, je veux dire, elles n'ont pas bougé de place, et elles ne vont pas le faire. Ma peur est incongrue, alors : respire, respire.

Par contre, je vais me faire aspirer, moi, c'est sûr.

J'ai 14 ans, je vis depuis toujours dans cette ville.

Je ne sais toujours pas où c'est, chez moi.

***

Un jour, j'écrirais l'histoire d'un vieux peintre et d'une jeune fille qui fait semblant d'être sur le point de mourir.

Je l'appellerai "Le vieux peintre et la jeune fille moribonde"

***

Tu vois, ça fait bien longtemps que je ne lui ai plus parlé.
Je ne sais pas si c'est moi ou lui qui a commencé. Commencé par le silence plutôt que de le garder.
Non, je ne lui en veux pas.
Tu sais, je suis comme ça moi, je ne déteste personne, je n'en ai pas l'énergie.

Bien sûr que ça m'est déjà arrivée.
Mais la haine, je m'y épuise.
Et après, dans le vide, on ne trouve finalement que du vide.
Alors il faut recommencer.
Enfin, c'est ce que l'on s'imagine.
Pour ça, il suffit de substituer un fantasme (fantôme) à un autre.
C'est amusant l'inconstance obsessionnelle.
Le même mouvement, la peine à perpétuité.


Et d'un coup sec, je le dégonfle le vide, tu sais, parce que je suis comme ça, moi, maintenant.

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